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Le monde, spectacle vivant

émerveillement, subst. masc. Sentiment d'admiration mêlée de surprise

La monde est un spectacle vivant. Chaque individu tient place sur une scène gigantesque pour jouer son rôle. Le rôle de sa vie. Ni plus ni moins. C’est la plupart du temps très appréciable, souvent merveilleux, incroyable ou touchant. Parfois ça l’est moins. Ainsi va la vie.

MIAM et BEURK

J’adore être réveillée par le chant d’un merle. Celui-ci jaillit toujours d’un coussin de feuilles, en notes ébouriffées. Le merle me semble toujours surpris par quelque chose. A l’inverse je suis un peu moins heureuse d’attendre un ami à côté d’un groupe de moineaux domestiques, dont le chant sec et répétitif m’irrite rapidement. Les scintillements hypnotiques du soleil à la surface de la mer sont un ravissement pour mes yeux, dont je ne peux guère me lasser, quelque soit la saison et la dureté du froid qui pique mon nez. En revanche la rivière bondissante, laiteuse et verte, gonflée par de récentes averses, ne me donne guère envie de m’asseoir au bord de son lit.

Miam et beurk

RIRE

Rire

Il m’arrive fréquemment de rire à ce spectacle. Par exemple il y quelques jours, je regardais évoluer un héron cendré le long des berges du canal. J’étais subjuguée par sa grâce, sa légèreté. Quand on sait que cet oiseau de presque deux mètres d’envergure pèse seulement deux kilos. Il me faisait l’impression d’un sage sans âge, d’un danseur de buto. Son pas calme et mesuré captait mon attention, j’étais suspendue à sa progression aquatique. Il guettait lentement le poisson qu’il allait pouvoir saisir avec son bec-harpon. Sans m’y attendre je l’ai vu glisser sur une pierre dont il avait mal jaugé la stabilité. Les ailes au dessus de la tête, les pattes emmêlées, le poisson disparu, il s’est retrouvé le bec dans l’eau. Cette scène m’a paru irréelle. Jamais je n’aurais pensé que l’erreur, la chute pouvait arriver à un animal sauvage, si doué, si adapté, si parfait.
J’ai réalisé à ce moment là que la « nature » était parfaite, car vivante, donc imparfaite.

EMOTION

Au milieu du printemps dernier, j’ai trouvé en rentrant chez des amis, une jeune chouette hulotte sur le pas de la porte. Elle avait tenté de quitter la loge, trop tôt semble t’il. Je craignais l’attaque d’un des nombreux chats du village, mais je n’osais pas attraper l’oiseau de peur que sa mère l’abandonne par la suite.
J’ai alors eu la chance d’avoir une amie au téléphone, connaisseuse, qui a pu me rassurer. « Cela arrive fréquemment à cette période, il suffit de la remettre dans un arbre, à proximité de là où tu l’as trouver, en hauteur. Sa mère viendra la récupérer ».

Émotion

Je me suis exécutée un peu intimidée. Je me suis accroupie, j’ai parlé à l’oiseau pour lui dire ce que j’allais faire et lentement je l’ai attrapé. La petite chouette était frêle entre mes doigts, si légère. Je n’osais serrer trop fort mes mains, car j’avais l’impression que je pouvais la briser, comme un verre de cristal fin. J’ai posé l’oiseau contre mon sein et j’ai rejoins le premier grand arbre, sur la place juste à côté de là où je l’ai trouvé. 

J’ai grimpé dans l’arbre, le plus haut que j’ai pu et j’ai déposé l’oiseau sur une branche, à proximité du tronc. Je l’ai regardé un moment, la petite chouette semblait calme. J’étais émue qu’elle se soit ainsi laisser faire et portée. Elle m’a paru comprendre que je ne lui voulait pas de mal. Je suis restée émue face à ce nouveau-né qui ne sait guère voler mais qui arrivait à tenir entre ses jeunes serres la branche que je lui proposais. Emue que notre rencontre s’arrête là, que je ne puisse en savoir plus sur son devenir.

Émotion 2

TRISTESSE

J’ai régulièrement envie de quitter la scène tant le spectacle me rend triste parfois. Quand je vois cette corneille qui veille sa comparse gisant sur le bitume d’une route départementale. Quand je vois le chat de mon père ramener une mésange bleue écorchée à la maison, pour jouer. Quand je vois le nombre de références de marque de yaourt dans un supermarché. Quand je marche dans une plantation de pins et qu’il n’ y a aucun bruit, aucun mouvement. Quand j’entends un coup de fusil. Quand je vois des mètres de terre retournées suite à un labour profond. Quand j’entends qu’on autorise encore l’utilisation de pesticides, fongicides, insecticides ou autre poison pour cultiver des légumes. Quand j’entends parler d’éco-terrorisme. Quand je lis le taux de suicide chez les agriculteurs. Quand des individus se retrouvent en prison ou sont tués pour avoir défendu une terre de sa bétonisation, une nappe phréatique de son assèchement, un cours d’eau de sa pollution ou un arbre de sa coupe. Quand les chalutiers raclent les fonds sous-marin pour que l’on passe un super Noël. Quand je vois des enfants disparaitre sous la terre pour récolter toujours plus de métaux pour nos téléphones. Quand j’apprends qu’il y a en moyenne 5OOO mille fois plus de résidus de pesticides dans un vin conventionnel que la dose à laquelle ils sont autorisés pour que l’eau ne soit pas considéré comme impropre à la consommation*. Santé  ! Quand des populations sont poussées à des kilomètres du village sommaire qu’elles ont réussi à aménager, car un groupe d’individus occidentaux pavé de bonnes intentions a financé l’installation du pompe leur permettant d’obtenir de l’eau potable et que celle ci est récupérée par le gouvernement local. Quand je vois que 10% des humains sur cette planète pensent que l’argent se mange.
Tristesse

EMERVEILLEMENT

Heureusement, qu’il y a le poulpe qui change de couleur à la vitesse d’une clignement d’oeil pour être en total mimétisme avec son milieu. La pipistrelle, qui invite l’humain à prendre soin de sa progéniture, lorsque le printemps à été rigoureux et qu’elle comprends qu’il n’y a pas assez de moustiques pour qu’elle et son bébé puissent survivre. Qu'il y a le cachalot qui invite un océanographe à jouer avec lui au bout de dix ans qu’il étudie son groupe*. Qu'il y a l’orchidée ophris abeille qui attire les butineurs en arborant des couleurs et des motifs imitant l’abeille. Qu’il y a la fourmi qui peut porter mille fois son poids. Qu’il y a les poissons qui évoluent mâle ou femelle en fonction de la disponibilité sexuelle de leur groupe. Qu’il y a le martinet qui ne se pose ni pour se reproduire, ni pour dormir. Qu’il y a des viticulteur.ice.s qui acceptent de perdre 30% de leur rendements habituels pour ne plus empoisonner leurs employés et leurs clients. Qu’il y a des artistes qui gardent coûte que coûte les fenêtres de nos cerveaux ouvertes. Qu’il y a des gens qui s’attachent à des arbres, qui parlent aux plantes, qui font des procès, qui lancent des alertes, crient, se mettent en grève, croient, aiment, rêvent. Qu’il y a des traders qui s’installent dans le Berry pour travailler la terre car ils ont compris que l’argent ne se mangeait pas.

Emerveillement
SPECTACLE VIVANT

Le spectacle vivant contient tout : le beau, le laid, la tristesse, la peur, le rire, la joie, la tendresse, toutes sortes d’émotions. Des couleurs ébouriffantes, des pelages soyeux, rêches, doux, sales, des plumages électriques, hypnotisants, éblouissants, des robes iridescentes, châmoirées, tachetées, veloutées, des peaux, des apparats, chatoyants, mimétiques, ergonomiques, imperméables, écaillés, translucides, fluorescents, des formes aérodynamiques, des langues d’un mètre, des os de douze, des consciences multiples, des envies, des essais, des ratés, des morts, des jeux, de l’amour, de l’action, du silence, du repos, de l’attente, du rien, du tout, du peut être, du son, du volume, des chants, des échanges, des dialogues, des dialectes, des accents, des limites, des espaces, de la pensée, du vivre, du vivre ensemble, du vivre seul, de la danse, de la hiérarchie, du collectif, de la prédation, de l’entraide, du changement, du mouvement, du rythme, de l’impermanence, du temps, de la liberté, de l’invisible, du grand, du petit, du moyen, du bon, du doux, de l’acide, du visqueux, du gluant, du salé, du croquant, de la vie !

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Tout cela est vrai et tout cela change. Cela peut changer. Moi aussi je change. Nous changeons tous.te.s. Nous sommes lié.e.s. Individué.e.s mais lié.e.s. Ensemble dans le même théâtre, dans le même spectacle. Le spectacle vivant du monde. Le spectacle vivant du monde m’émerveille. Il m’émerveille car je n'en connais pas les dessous. Je ne l’ai pas écrit, je ne l'ai pas pensé, je n'en ai pas eu l’idée. Je ne connais pas le scénario, je ne connais pas les dialogues, je ne connais pas l’intrigue, ni les rebondissements, encore moins le dénouement. Je connais seulement quelques personnages que je rencontre au fil du temps. Ce spectacle m’émerveille et me touche car il me dépasse. J’en fait partie et je n'y comprends rien. Et j’adore ça. N’y comprenant rien, je suis tout le temps surprise. Et cela en fait un très bon spectacle.

Je me réjouis d’avoir la capacité et la possibilité de l’apprécier. Je me réjouis d’être libre. Je me réjouis de pouvoir moi-même jouer le rôle de ma vie d’être humaine sans trop de heurt. Ni plus ni moins. Je ne veux pas gagner. Je ne veux pas avoir le premier rôle ou le dernier. Je veux que l‘importance des rôles tournent. Je ne veux pas être moins que, Je ne veux pas être plus que, je m’en fou. Je veux être à ma place. Être à ma place dans ce théâtre, dans ce spectacle, habiter et être habitée par ma place de vivante parmi les vivants. D’animal humain parmi les animaux non-humains.

Je déplore que certains individus animaux-humains, occupent un peu trop la scène et la souillent, l’abîment, n’en prennent pas soin. Ils bousculent, maltraitent, tentent d’éradiquer d’autres membres de la pièce. Comme si cela aller rendre le spectacle meilleur. Comme si cela aller leur donner plus de succès. Je souhaite que chaque protagoniste continue à avoir sa place, sans avoir à passer sa vie à tenter de la garder. Je souhaite que ce spectacle continue à jouir d’une diversité de personnages, de décors, de scènes, de couleurs, de relations. Le théâtre est grand mais pas infini et s'il manque des personnages, le spectacle va devenir mauvais. Si le spectacle devient mauvais, on va sacrément se faire chier. Je veux qu’on change nos imaginaires derrière le mot réussite, succès. Je veux qu’empoisonner la terre devienne hasbeen, je veux que changer de téléphone tous les ans devienne craignos, je veux que prendre l’avion pour aller donner un concert à l’autre bout du monde ne soit plus l’idéal vers lequel chaque jeune artiste tend.

Je ne veux pas donner de leçon, je veux partager les quelques trucs que je connais, un regard, une écoute, une émotion. Je veux faire une soupe de billets et la servir à nos dirigeants pour qu'ils se rendent compte que cela ne se mange pas. Je veux favoriser des espaces pour échanger, partager, je veux activer, passifier*, continuer à toucher-être-touchée*, par et  auprès de celleux qui choisissent la vie plutôt que la soupe de billets. Je veux jouer, faire entendre ma voix, avec celles des autres, pour que l’on continue à s’émerveiller ensemble du spectacle vivant du monde.

Oeuvres 

Merle Mâle, Sabrina Riggio, 2020, Artmajeur

Le Héron Cendré, Philippe Tallis, 2016, Artmajeur

OWL#03, Camille Sanchez, 2021 Artmajeur

OWL#07, Camille Sanchez 2019, Artmajeur

Regards, Inondations, Geneviève Clamens, 2020, CP

Cachalot, Anne-Sophie Nguyen, 2020, Artmajeur

Presque Imparfait, Julien Alins, 2022, Carla Bayle

Spectacle Vivant

ET DONC ?

Pas de fumée sans feu, pas d'omelette sans casser des oeufs, pas d'espoir sans action. Pour continuer à entendre le monde chanter et chanter avec lui, je n'ai rien trouver d'autre que de faire ce que je peux, ce que je sais faire, à mon niveau, à ma hauteur d'humaine de 170 cm. 
Mon parcours m'a amené à rencontrer des gens merveilleux qui oeuvrent chaque jour pour faire du bien au monde. J'ai eu l'opportunité d'être accompagnée dans mes apprentissages, de participer à des projets, de soutenir des initiatives.

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Centre de soin faune sauvage 05 04​

Michel Phisel

NATURE EN OCCITANIE

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et protection de l'environnement

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Aujourd'hui je reste engagée auprès de structures et d'individus dont l'implication me touchent et qui me font grandir

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protection du Singe Magot et de préservation des relations homme-singe - Haut Atlas Marocain

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WeOcean

Association de sensibilisation, de recherches

et de protection de l'Ocean

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 ( : merci : )

vous pouvez suivre leur travail en cliquant sur les logos

notes : â€‹

Certains éléments auxquels je fais références dans ce texte proviennent de gens que j'ai lu ou écouté parler. ​

Dans l'ordre :

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SERALINI Gilles-Éric & DOUZELET Jérôme. Le goût des pesticides dans le vin. Actes Sud. 2018

SARANO François. Le retour de Moby Dick. Actes Sud. 2022. / Mon ami le cachalot . Envoyé Spécial 18 janvier 2018

BIGÉ Emma. Mouvementements. La Découverte. 2023

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